Nadiejda, La Petite Russie (2008-2010)

Nadiejda, ma mère. Des photographies de Nadiejda jeune, des photographies de Nadiejda vieille. Que s'est-il passé entre temps ? La vie. Entre sa réalité et la mienne, toutes deux nourrissant notre fiction, notre mythologie familiale par la mémoire des choses, des évènements. Ma mère est agée. Elle s'en va. Et sa mémoire la précède. Alzheimer, "la terrible", comme elle la nomme elle-même. Ma mère s'en va, et "elle ce sera moi". Alors, vite, avant que le temps ne nous emporte définitivement, je l'arrête comme si j’arrêtais de respirer, par touches successives, par centièmes de secondes. Nadiejda est aussi la dernière personne identifiée de ma famille ascendante. Le dernier lien avec les origines. Le pilier, le soutien, les fondations, s’en iront avec elle. Il ne restera que des souvenirs infidèles, périssables, des photos, et le journal que Nadiejda tient quotidiennement depuis le diagnostic de sa maladie.
Depuis l'année 2008, je la photographie à chacune de nos rencontres. D'abord dans la maison où elle vivait en recluse (1. La Petite Russie), et depuis le printemps 2010, dans la maison de retraite, où certainement elle s’éteindra. (2. L’Oasis). Nadiejda continue, elle, à écrire, mais de moins en moins.

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